Vous devez préparer votre campagne d’entretiens… d’évaluation. Le mot est lâché.
Un sujet souvent délicat dans le contexte de l’entreprise. Et sa récurrence n’y change rien. En témoigne ces chiffres : 31% des salariés estiment ne pas pouvoir s’exprimer librement durant leur entretien annuel, 70% des managers le considèrent comme une perte de temps et 70% des responsables RH l’estiment inefficace. Le recours à une grille d’évaluation, élaborée selon une méthode rigoureuse et des critères judicieux pourrait changer la donne…
Découvrez notre guide complet pour élaborer une grille d’évaluation des compétences professionnelles. Nous vous expliquons comment structurer vos critères d’évaluation pour une analyse des compétences en entreprise efficace, couvrant les compétences techniques et comportementales
Dans les relations sociales, durant son parcours scolaire ou à l’université, la vie est une suite d’évaluations, explicites ou non. Au travail, cet examen de nos aptitudes et performances individuelles au sein du collectif prend notamment la forme d’un entretien annuel. Tous les collaborateurs d’une entreprise y sont soumis. S’il est un moment où sortir sa grille d’évaluation des compétences professionnelles, c’est bien celui-ci.
Toutefois, pour un responsable des ressources humaines, elle se révèle utile en bien d’autres circonstances, car évaluer les compétences, ce n’est pas forcément évaluer la performance. Ainsi, elle peut être mobilisée à l’issue de formations pour mesurer l’acquisition de nouveaux savoirs, savoir-faire ou savoir-être, lors d’un recrutement pour estimer l’adéquation du candidat rencontré et du poste à pourvoir, ainsi que dans le cadre de la stratégie de mobilité interne. Elle peut donc aussi tout à fait être mobilisée lors de l’entretien professionnel, dont le but est, quant à lui, de tracer les perspectives des collaborateurs au sein de l’organisation.
Bref, à chaque étape de la gestion des compétences, la grille d’évaluation constitue un solide allié, riche d’enseignements sur les ressources de l’entreprise. Elle apporte des informations à l’échelle individuelle concernant le salarié, au cœur du processus, ainsi qu’à l’échelle collective. À chacune de ces deux strates, elle permet de prendre décisions afin de combler les écarts observés entre la stratégie d’une organisation et la réalité de ses ressources.
Il n’est cependant pas toujours évident de savoir sur quoi se fonder pour la créer. Revenons aux fondamentaux : qu’est-ce qu’une grille d’évaluation professionnelle ?
Qu’est-ce qu’une grille d’évaluation des compétences ?
Dans le domaine pédagogique, une grille d’évaluation rassemble les critères qui permettent aux enseignants et examinateurs de déterminer si un élève possède bien le socle de compétences en adéquation avec le niveau auquel il se trouve, ou encore s’il est prêt à changer de cycle.
D’après le Canadien Gérard Scallon, docteur en théorie de l’éducation, la grille d’évaluation intervient dans l’appréciation de la réalisation de tâches complexes.
Elle « permet notamment de porter un jugement sur la qualité d’une production ou d’un produit, l’accomplissement d’une prestation ou d’un processus qui ne peuvent être jugés tout simplement bons ou mauvais comme dans le cas d’une question à correction objective ».
Si cette définition de 2004 s’applique au champ d’étude du théoricien, lorsqu’on la transpose à celui des entreprises, elle reste pertinente. En effet, que mesure une grille d’évaluation sinon la capacité de collaborateurs à déployer les connaissances et gestes professionnels attendus pour la fonction et les tâches qui leurs sont assignées ?
Mais Gérard Scallon l’énonce, les compétences, plus particulièrement lorsqu’elles sont comportementales ou douces, sont difficiles à objectiver. La réalité est rarement binaire. La position de RH, de responsable formation ou de manager implique pourtant de se plier à l’exercice en laissant autant de biais possible de côté. Aussi, mesurer les capacités professionnelles d’un collaborateur – techniques, humaines ou organisationnelles – passe par l’identification de critères afférents au poste, à son environnement opérationnel et aux objectifs qui lui ont été fixés.
Quand on évalue les compétences, on évalue en réalité la cohérence entre un contexte d’exercice et le travail fourni par le salarié. « Ces critères sont les indicateurs au regard desquels un manager pourra déterminer si l’objectif a été atteint ou non, et dans quelle proportion », explique Amandine Ruas, coach et experte RH dans son cours dédié à la gestion de la performance des collaborateurs, accessible sur la plateforme Openclassroom.
Les critères peuvent être quantitatifs ou qualitatifs, les premiers s’appliquant plus aisément aux hard skills et les seconds aux soft skills.
Prenons l’exemple d’un documentaliste en entreprise. L’un de ses objectifs pourrait être de maîtriser les différents systèmes d’indexation de documents. Pour en estimer la réussite, le manager RH peut considérer le laps de temps nécessaire au documentaliste pour archiver chaque nouveau document qui lui est transmis. Il s’agit d’un indicateur quantitatif. Il peut aussi observer la qualité de son travail d’archivage : d’autres membres du même service peuvent-ils accéder et se repérer facilement dans ce système ? Ce dernier est-il cohérent ?
Les critères d’évaluation des compétences sont généralement gradués, voire correspondent à une note. L’objectif, la tâche ou le savoir-être évalués sont-ils remplis au-delà des attentes, conformément à celles-ci, en deçà ou pas du tout ? Il est possible d’exprimer ces niveaux en pourcentages, mais aussi d’établir des coefficients, en fonction du caractère prioritaire de chaque critère. Certains sont indispensables à l’exercice d’un poste, d’autres constituent des bonus.
GAGNEZ DU TEMPS SUR VOTRE SUIVI DE FORMATIONS
Remettez vos collaborateurs au cœur de votre plan de formation
Performances ou compétences ?
La gestion et la mesure des compétences peuvent répondre à différentes approches : la stricte réalisation des objectifs, autrement dit la performance, ou bien le travail effectué, indépendamment de celle-ci. Tout comme la qualité, le potentiel peut lui aussi être apprécié.
Les approches peuvent se combiner et se compléter, selon des proportions propres à chaque entreprise, pour ne négliger ni les résultats tangibles ni l’attitude de l’employé et la façon dont il les obtient. Finalement, tout dépend de ce que vous souhaitez que votre grille renseigne. Voulez-vous en faire un outil de pilotage par les compétences ou bien en savoir plus sur le rendement de vos collaborateurs ?
C’est cette philosophie et vos valeurs que reflètera votre grille.
Pour aller plus loin, découvrez notre guide sur l’Évaluation des compétences en entreprise : l’essentiel en 2024.
Quels sont les avantages d’une grille d’évaluation des compétences ?
Un tel outil présente plusieurs avantages, dont l’un des principaux est de fournir une vision globale, mais synthétique, des compétences des collaborateurs. Elle permet d’identifier en un coup d’œil les passerelles entre compétences requises et acquises.
Pouvant être conçu à partir de modèles de grilles existants, il s’adapte avec précision au contexte de l’entreprise et de chaque poste évalué, et s’imbrique également à une démarche de gestion prévisionnelle des emplois et de parcours professionnels. Grâce à ce type de grille, vous faites le point sur les savoirs, savoir-faire et savoir-être disponibles et sur la meilleure façon d’en tirer avantage aujourd’hui et à l’avenir.
Autre point essentiel, la grille peut servir de base aux entretiens annuels. Organisés pour évaluer les compétences, la performance, les forces, faiblesses et marges de progression de chaque employé, ces temps d’échange individuels ne s’improvisent pas. L’employeur, ou son représentant, tout comme l’employé doivent le préparer avec soin. Muni de la grille d’évaluation, chacun pourra peaufiner les aspects qu’il souhaite aborder, ses arguments et ses requêtes, le cas échéant.
Dans la même logique, ce système d’appréciation permet d’enclencher la discussion le jour même de l’entrevue. En fixant, tel un instantané, la situation du salarié, elle offre la possibilité d’un dialogue constructif et de solutions élaborées conjointement. La personne évaluée a-t-elle besoin de monter en compétence ? Auquel cas, le responsable formation devra lui proposer les actions de formations adaptées.
Ou alors, au vu des résultats obtenus, ce sont peut-être ses objectifs ou son plan de carrière qui devraient être réajustés ? Vous l’aurez compris, cet outil suggère un pilotage de la compétence ciblé.
Mais pour atteindre sa cible, à savoir la mobilisation des bonnes ressources et la réalisation effective des objectifs établis, la mise en place de la grille implique de la clarté. Elle place ainsi le manager RH ou le chef de service chargé de l’évaluation dans la nécessité d’éclaircir ses attentes et donc les critères à travers lesquels il jugera de la qualité de travail du collaborateur.
Si la précision des indicateurs profite aux dirigeants, elle se révèle primordiale au collaborateur. Le recours à une grille claire et à des critères bien définis et admis renforce la perception de transparence. « Comment le salarié pourrait-il performer, s’il ne sait pas ce qui est attendu de lui, quelles sont ses priorités et sur quels paramètres son travail sera évalué ? », pointe encore Amandine Ruas, dans son cours en ligne.
6 conseils pour réussir sa grille d’évaluation des compétences
Pour élaborer une grille d’évaluation des compétences pertinente, voici quelques principes de base que nous vous conseillons de mettre en œuvre.
1. Spécifiez le but intrinsèque de la grille.
Servira-t-elle à évaluer les compétences humaines et transversales ou plutôt techniques ? En fonction de ce choix, les objectifs que vous évaluerez et les critères sur lesquels vous vous appuierez pour le faire différeront.
Pour les compétences techniques, il vous faudra coller au plus prêt du quotidien du collaborateur ou du poste à pourvoir, si vous évaluez un candidat au recrutement.
Les soft skills font souvent l’objet de critères plus génériques, duplicables pour de nombreuses fonctions.
2. Restez le plus clair possible. Les objectifs et les critères doivent être intelligibles.
Prenez le temps de réfléchir à leur formulation. Préférez un style direct et la voix active.
Dans le cas de notre archiviste, vous pourriez, par exemple, écrire :
Objectifs | Critères d’évaluation |
Se montre à l’écoute et fait preuve de pédagogie avec ses collègues concernant l’utilisation de l’outil de recherche des archives numériques. | Comprend le besoin des collaborateurs. |
Reçoit régulièrement les collaborateurs lors de rendez-vous dédiés aux recherches spécifiques. | |
Organise des sessions pour leur apprendre à manipuler l’outil de recherche. |
3. Gardez votre impartialité.
L’un des intérêts d’une grille est d’objectiver l’évaluation des salariés. Chacun est victime de biais de perception, qui peuvent, entre autres, pousser un supérieur hiérarchique à juger son subalterne à l’aune de sa personnalité plutôt que de la qualité de son travail. La CFDT le rappelle dans sa plaquette L’évaluation : halte aux rendez-vous manqués, à l’attention des cadres : « L’évaluation [est] centrée sur le travail et non sur la personne. C’est un rendez-vous avec l’activité professionnelle ». Soyez vigilant lorsque vous rédigez vos critères et estimez la réalisation effective des objectifs.
4. Communiquez et partagez l’information.
Par-là, nous entendons votre grille et vos critères. En effet, l’évaluation a plus de chances de réussir et d’être utile à la progression du collectif si les modalités qui la régissent sont comprises et admises par tous. Poussée à son paroxysme, la démarche peut même déboucher sur la rédaction d’un référentiel commun d’évaluation des compétences.
5. Intégrez votre grille à une évaluation à 360°.
La démarche repose sur la collaboration des différentes parties et non plus du seul chef de service ou de projet. Dans ce type de processus, le collaborateur est le premier à mesurer son travail, grâce à des outils d’auto-évaluation. Son travail est aussi examiné par ses collègues et, enfin, son manager.
Le but : aboutir à une photographie la plus complète possible.
6. Utilisez les bons outils.
Pour matérialiser votre grille, vous pouvez utiliser différents outils. Crayon-papier pour les nostalgiques, Excel, bien sûr, et autres tableurs numériques, mais aussi des solutions intégrées, pour vous faciliter la vie. De nombreux systèmes d’information RH (SIRH) permettent de gérer la compétence des équipes de manière fine.Cela concerne également l’aspect évaluation.
Premier réflexe : regardez si votre logiciel le permet et, à défaut, cherchez une solution technologique compatible.
👉 Créer votre grille de compétences comme un pro sur Excel
Prompt IA sur les grilles d’évaluation des compétences
L’intelligence artificielle (IA) transforme radicalement la manière dont les compétences sont évaluées en entreprise. Voici quelques points clés sur cette évolution :
- Analyse des Données en Temps Réel : L’IA permet de collecter et d’analyser des données en temps réel, offrant une vue précise et immédiate des compétences des employés. Les algorithmes peuvent identifier des tendances et des lacunes de manière continue, facilitant une évaluation plus dynamique et précise.
- Personnalisation de l’Évaluation : Grâce à l’IA, les grilles d’évaluation peuvent être adaptées individuellement. Les systèmes intelligents peuvent recommander des compétences spécifiques à évaluer pour chaque employé, en fonction de leur poste, de leur performance passée et des objectifs de l’entreprise.
- Réduction des Biais : Les outils basés sur l’IA peuvent aider à minimiser les biais humains dans les évaluations. En se basant sur des critères objectifs et des données quantitatives, ils assurent une évaluation plus équitable et transparente.
- Formation et Développement : L’IA peut également suggérer des parcours de formation personnalisés en fonction des résultats des évaluations, aidant ainsi les employés à combler leurs lacunes et à développer de nouvelles compétences pertinentes pour leur carrière.
- Feedback Continu : Les plateformes d’évaluation basées sur l’IA fournissent un feedback continu et constructif, permettant aux employés de s’améliorer constamment et aux managers de mieux accompagner leurs équipes.
Exemple Pratique : Imaginez une entreprise utilisant un outil d’IA qui analyse les compétences techniques des développeurs. L’outil peut identifier les compétences les plus courantes et celles manquantes, puis recommander des formations en ligne pour combler ces lacunes. De plus, il peut fournir des rapports détaillés aux managers pour les aider à mieux comprendre les besoins de leurs équipes.
En conclusion, l’intégration de l’intelligence artificielle dans les grilles d’évaluation des compétences permet non seulement de rendre les évaluations plus précises et équitables, mais aussi de favoriser le développement continu des compétences des employés. Cette approche moderne et innovante est essentielle pour les entreprises qui souhaitent rester compétitives et soutenir la croissance professionnelle de leurs équipes.
Voici quelques exemples de prompts à utiliser avec une IA pour créer des grilles d’évaluation des compétences :
Prompt 1 : Évaluation des compétences techniques
« Créer une grille d’évaluation des compétences techniques pour un développeur logiciel. Inclure des critères tels que la maîtrise des langages de programmation, les compétences en résolution de problèmes, l’expérience avec les frameworks spécifiques et la capacité à travailler en équipe. Chaque critère doit être noté sur une échelle de 1 à 5, avec des descriptions claires pour chaque niveau. »
Prompt 2 : Évaluation des compétences comportementales
« Générer une grille d’évaluation des compétences comportementales pour un manager d’équipe. Les critères doivent inclure la communication, le leadership, la gestion du temps, l’adaptabilité et la résolution de conflits. Fournir des exemples concrets pour chaque niveau de compétence sur une échelle de 1 à 5. »
Prompt 3 : Évaluation des compétences en service à la clientèle
« Créer une grille d’évaluation des compétences pour un agent de service à la clientèle. Les critères doivent comprendre l’empathie, la capacité de résolution de problèmes, les compétences en communication verbale et écrite, la gestion du stress et la connaissance des produits. Chaque compétence doit être évaluée sur une échelle de 1 à 5, avec des explications détaillées pour chaque note. »
Prompt 4 : Évaluation des compétences en marketing digital
« Élaborer une grille d’évaluation des compétences pour un spécialiste en marketing digital. Inclure des critères tels que la maîtrise des outils de marketing digital, la capacité à analyser les données, la créativité, les compétences en SEO et la gestion des campagnes publicitaires. Utiliser une échelle de 1 à 5 pour noter chaque compétence, avec des descriptions pour chaque niveau. »
Prompt 5 : Évaluation des compétences en gestion de projet
« Concevoir une grille d’évaluation des compétences pour un chef de projet. Les critères doivent inclure la planification et l’organisation, la gestion des ressources, la communication avec les parties prenantes, la gestion des risques et la capacité à respecter les délais. Évaluer chaque compétence sur une échelle de 1 à 5, avec des descriptions précises pour chaque niveau. »
Ces prompts peuvent être adaptés selon les besoins spécifiques de votre entreprise et des postes à évaluer. Ils aident à structurer et standardiser l’évaluation des compétences, garantissant ainsi une approche équitable et détaillée.
Modèle de grille d’évaluation des compétences
Grille d’évaluation fournie par Édusign :
Nous avons rempli les premières lignes du modèle de grille d’évaluation ci-dessous avec des données concernant, à nouveau, le métier de documentaliste.
Pour élaborer notre exemple, nous nous sommes notamment appuyés sur le catalogue d’évaluation du Centre de gestion de la Haute-Garonne :
Ainsi que sur l’exemple de grille proposé par HEC Montréal :
Précédemment sur Skills Mag :
- Reskilling et recrutement : un mariage prometteur ?
- Engagement des salariés : et si la communication interne était la solution ?
- Assessment center : tout ce qu’il faut savoir
- Le Compte d’Engagement Citoyen (CEC) : Un levier pour valoriser l’engagement bénévole et citoyen
- Créer des formations internes grâce à l’IA